Inventaire à la Prevert selon Pierre de lune
Pour Hélène, et venant de Pierre
Voici Hélène, pour ton anniversaire, un cadeau pour toi.
C'est mon inventaire à la Prévert, mais comme c'est le mien,
je vais l'appeler « Mon inventaire à la Pierre »
MON INVENTAIRE A LA PIERRE - Prevert
une triperie un hôpital des jeux
deux pierres trois fleurs un oiseau un seul Pierre, trois fleurs infirmières,
deux droles d'oiseaux : P. et L.
vingt-deux fossoyeurs un amour seulement de l'affection et beaucoup d'attention
un citron un pain des smarties, des goûters, du poisson que j'aime pas
un grand rayon de soleil le rayon de soleil de Maman qui calme les
une lame de fond lames de fond des fois : Hélène
un pantalon un pantalon qu'il faut des fois changer,
mais maman n'apporte jamais ce qu'il faut...
une porte avec son paillasson une porte blanche avec dedans des couleurs
un sculpteur qui sculpte des Napoléon une équipe qui chante des chansons et fait des rondes
la fleur qu'on appelle souci des soucis qui peuvent devenir Fleurs
un carnaval de Nice un carnaval : celui de la Vie
deux petit'suisses un grand pardon deux petits suisses, un grand pardon
(si je recrache sur le côté)
un chien du commissaire un jour de gloire IDEM !
un père Noël un père Noêl et « même pas peur »...
deux sœurs latines un frère une soeur que j'aime tant
trois dimensions la mienne, la vôtre, moi j'en vois qu' deux
mille et une nuits mille et une nuits à sauter sur mon lit
cinq gouttes après chaque repas ah non, ça j'en veux pas
quarante minutes d'entracte mes entractes c'est toi
une seconde d'inattention mes secondes à moi peuvent durer plus longtemps
et naturellement et naturellement
le raton laveur Mon Hélène du coeur
Mais il y a une suite, Prevert, il n'avait pas tout vu : je rajoute et poursuis, mon Inventaire à la Pierre
des repas tout seul
des regards tout droit
des bisous
des calins
des odeurs de parfum
des rires quand il le faut
des sourires de charmeur
des rires pour de faux
des yeux limpides que je comprends très bien
des astuces pour m'empêcher de tourner en rond
des chansons que j'aime bien
du travail pour te faire plaisir
des sourires du coeur
pour te montrer tout mon amour
pour te montrer combien
je suis content que
tu sois contente
de moi petit Pierrot la lune...
Un ou deux crachats
Pourquoi pas ?
Un petit peu de terre
Pour quoi faire ?
Je ne sais pas vraiment pourquoi, mais il faut faire avec tout ça, alors même que ma bulle s'est ouverte comme une coquille d'oeuf, le petit poussin est en train de sortir, je pèse juste 20 kilogs !
Sans toi, je sais bien, qu'aujourd'hui encore, quand ma maman me dit :
« Pierre, apporte moi ta doudounette » ; je ne serais capable peut-être que d'un regard vague, vers le vide...
Grâce à toi, Hélène, mon ange gardien tombé du ciel, j'ai appris peu à peu, à faire que les mots ne tombent plus dans mon vide, ce vide qui résonnait si douloureusement.
J'ai plein de mots à mon vocabulaire : la coquille s'est ouverte et d'elle je m'entends parfois dire des prénoms : maman, papa, Niet niet, Map Map, Mimi, Nènène;
Si tu es forte tu sauras retrouver le tien.
Ma chère Nènène, je te souhaite un heureux anniversaire.....
Signé : ton Pierrot préféré, c'est-à-dire MOA.
Ps : Je te fais des bisous, comme d'habitude un peu dans le désordre, mais tu feras le tri, un coup les bras autour du cou, un coup les lèvres fixes sur la joue, un coup un regard jusqu'au fond de ton âme... je te fais "mon Pierre qui t'aime"
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Hélène est l'infirmière puer' de Pierre.
Elle est la personne qui s'occupe de lui et lui a fait commencer (avec toute l'équipe de l'hôpital des jeux) un programme teacch adapté à lui seul. Il la voit trois fois par semaine. Elle fait tout simplement partie de sa vie, de son monde - le nôtre...
Pierre est très attachée à Hélène, et je dois bien le dire, moi aussi.
Il y a de cela quelques temps, j'avais écrit quelque part l'importance d'Hélène dans le processus d'apprentissages de Pierre, mais aussi dans son approche de la maman que j'étais. Il y a maintenant deux ans, et cela donnait ça :
"Je me débats, j’ai mal, je rogne ma patte blessée pour me libérer. Je souffre.
J’ai peur, peur de demain, d’après-demain et des jours d’après.
Garder son sang-froid. Ne pas se barricader, ouvrir grandes les portes du cœur, de l’âme. Je souffre d’une maladie incurable et chaque heure qui passe me rapproche de celle de mon fils. Ce désespoir n ‘aura pas de fin, je l’ai enfin compris. Il n’y a pas de fond, mais surtout, surtout ne pas se noyer. Alors quoi ?
S’accrocher à toutes les branches de l’arbre de la vie ; se nourrir du miel des abeilles qui volètent autour de Pierre, mais qui jamais ne le piqueront.
Hélène, mon sourire du jeudi. Hélène, la brune Hélène aux interrogations si douces, à l’accueil toujours enjoué. Oui, Hélène est une des petites abeilles de Pierre, elle le prend dans ses bras et l’emmène vers ce couloir multicolore. Maintenant, c’est lui qui part devant. Il connaît la route, son chemin du jeudi, sa récréation, son plaisir.
Hélène, mon lien-liane entre mon monde et celui de l’hôpital.
Hélène cultive le potentiel de Pierre, et Pierre l’aime. Son visage quand nous passons le porche et qu’il reconnaît l’endroit.
Ses petits gloussements quand il comprend où je l’emmène.
Il est chez lui, déambule, sourit, est content. Pierre est heureux.
Hélène s’acharne, Hélène lutte. Sa joie quand elle a pu l’attraper, le ramener vers elle ; par une chanson, un jeu de mains, une comptine. Le réconfort qu’elle offre quand « non, décidément, aujourd’hui, Pierre a fermé ses portes ». Réconfort : « il n’avait pas envie, c’est tout »
Réconfort, calme et énergie pour Pierre, et pour sa maman, parfois lasse.
A qui puis-je dire merci d’avoir placé Hélène sur le chemin de vie de Pierre, mais aussi sur le mien ?
Je ne sais pas très bien, mais je le dis haut et fort Merci...
mille fois "merci" "